
Platonik aborde les coulisses de l’élaboration d’un roman. Comment planche une romancière pour écrire son livre ? Qu’est-ce qui se passe dans la tête d’une jeune femme affranchie, libre de toute entrave familiale, libre d’exprimer à travers son corps une sexualité sans tabou comme le ferait un homme ? Car oui, il y a quelque chose de masculin dans sa manière d’approcher ou de conduire ses relations avec ses partenaires de sexe opposé. Jusqu’aux mots qu’elle emploie pour raconter leurs étreintes, pour parler de ses amants qui lui ont tout appris et pour avouer combien se frotter à eux l’a initiée aux relations humaines, sociales et l’a aidée à découvrir qui elle était.
Laura écrit, donc. Et alors qu’elle traverse une crise que connaissent tous les écrivains, un ami lui demande son aide pour l’élaboration de son roman.
C’est peut-être la partie qui m’a le moins passionnée. Ces passages didactiques où Laura illustre ce futur roman à deux de fiches techniques sur la littérature. Tel le furet de la comptine « Il est passé par Stendhal, il repassera par Faulkner… » Certains apprécieront ces digressions sur les grands auteurs à leur juste valeur, moi, elles m’éloignaient de l’histoire.
Le roman en lui-même est d’une grande saveur.
On y parle d’amitié et de relations humaines. Les dialogues sont justes, de ceux qui nous font oublier que l’on est en train de lire. On y boit du sancerre frais, anguleux et doré comme un topaze. Les fleurs sauvages poussent dans les fissures du ciment de la cour et les bedaines moelleuses possèdent des vertus consolatrices…
On y croise des personnages magnifiques d’authenticité. Laura au caractère bien trempé, mais aussi généreuse, charismatique, fantasque et possédant de surcroît une belle dose d’humour. On rêverait d’avoir pour amie ou amante, ce don Juan au féminin. Duncan, romancier narcissique qui n’accepte pas de vieillir, est torturé à la fois par le passé et par une récente maladie. Qu’on l’aime ou pas, sa présence dans le roman a du poids comme en ont également les personnages de Mélinda ou de Yon.
Moi qui, habituellement, ne suis pas friande des scènes de sexe dans les romans, je dois reconnaitre qu’ici, elles sont exécutées de main de maître. Pour vous mettre l’eau à la bouche « Tais-toi, boucle-la. J’agrippe ses fesses pour l’enfoncer plus vite, plus profond. Bienheureuse écartelée, ce martyre te sera compté au paradis. On explose ensemble, sans un cri. Béate, je flotte entre deux eaux, drapée dans le linceul fleuri du couvre-lit. A mon côté, un corps foudroyé ». C’est beau, non ? On ne peut plus cru, mais dit avec grande élégance. Le contraire de la vulgarité.
C’est cela de la belle littérature. Et il semble bien que ce livre réalise une sorte d’exploit : me réconcilier avec l’érotisme littéraire.
Le livre : Laura, jeune romancière au caractère bien trempé, rencontre Duncan, auteur célèbre et vieillissant, atteint d’une maladie rare. Il lui demande de l’aider à se documenter pour un projet de livre.
Cela tombe bien, elle est en panne dans son nouveau roman. Un lien ambigu se tisse entre les deux écrivains, entre le désir et son empêchement, entre la création et ses entraves. Alors qu’ils séjournent ensemble à l’étranger, par la grâce d’une rencontre amoureuse, Laura s’affranchit des exigences de plus en plus abusives de Duncan. Mais jusqu’où ce diable d’homme est-il capable d’aller ?Élégant dans la forme et audacieux dans le fond, Platonik s’empare d’un thème orphelin en littérature pour le renouveler à travers deux personnages formidablement incarnés.
En format kindle et broché. Editeur : Itil Editions (23 novembre 2017)Collection : LITTERATURE
ISBN-13: 979-1095895039ASIN: B077MR2N36 Dimensions du produit: 2 x 13,5 x 21 cm
L’auteur : Nila Kazar, romancière et nouvelliste, travaille dans l’édition et enseigne à l’université la création littéraire et l’écriture de scénario. Elle tient le blog Bazar Kazar – Y a-t-il une vie après l’édition ? Déjà paru aux mêmes éditions : Sauvée par Shakespeare, nouvelles.