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Les Interviews Littéraires du Colibri Rouge

  • Photo du rédacteur: murielmartinellaauteur
    murielmartinellaauteur
  • 23 nov.
  • 8 min de lecture

Dernière mise à jour : 24 nov.

Accompagnée de mon livre « L’ange roux et le corbeau » (Grrr’Art Édition, collection Contre Chant) j'ai été l'invitée du jour pour une interview.


Voici l'interview complète pour la rubrique « Les Interviews Littéraires du Colibri Rouge ».


1. Pouvez-vous nous parler de votre dernier ouvrage ? Quelle en est l'inspiration principale ?

Mon nouveau livre « L’ange roux et le corbeau » sorti le mois dernier chez Grrr’Art Édition fait partie de la géniale collection « Contre Chant ». C’est-à-dire que notre éditeur a demandé à ses auteurs d’écrire 8 petits textes à partir de 8 chansons d’un(e) chanteur(se). J’ai choisi Mylène Farmer, car elle possède tout un univers qui me correspond, mystérieux pour ne pas dire mystique, sulfureux, poétique... S’inspirer sans pasticher, telle était la consigne !

On y trouve cette petite fille qui s’interroge : « Dis maman, pourquoi je suis pas un garçon ? » et qui se prend pour le chevalier d’Éon, rien que ça ! Il y a cet amour impossible entre un prêtre et une paroissienne amoureuse de l’élégance qu’apporte le « vous », il y a cet homme qui, à la fin de sa vie, rencontre son âme et qui s’engouffre avec elle dans un ailleurs vertigineux parce que l’avenir le terrifie, il y a ce ruisseau sur la berge de laquelle le rire cristallin de deux petites sœurs retentit avant que l’eau ne se teinte de rouge, il y a ces textos échangés entre deux amants où le Dieu l’emporte sur le diable, et encore ceux-là d’amants, ceux-là, gisants, pour avoir franchi une limite indépassable, il y a cet amour filial qui se pose de partout dans la chambre de l’EHPAD où une mère vit ses derniers jours...

Ou encore ce ciel de Californie ravagé par les incendies et sur lequel des yeux se ferment en toute éternité... 8 textes féroces ou romantiques qu’il m’a plu d’écrire en sortant de ma zone de confort.


2. Comment décririez-vous votre processus d'écriture ? Avez-vous des rituels ou des habitudes spécifiques lorsque vous écrivez ?

Non. Pas vraiment. Je peux écrire à n’importe quel moment de la journée ou de la nuit et n’importe où à condition que je sois dans le calme, sans musique et sans stimuli extérieurs. J’écris sur mon ordinateur calé sur mes genoux, que ce soit dans mon lit, mon canapé, les reins bien calés. Il faut que je sois confortablement installée pour oublier mon corps.

Les idées me viennent beaucoup la nuit, je ne pense pas être la seule à me relever pour vite noter un paragraphe qui me semble génial. Lorsque je le relis le matin, il me paraît beaucoup moins extraordinaire, plutôt plat. La réécriture diurne est de mise, mais l’idée a été nocturne.


3. Quelle est la partie la plus difficile de l'écriture pour vous, et comment la surmontez-vous ?

La partie la plus difficile pour moi, ce sont les premières phrases. On sait qu’il faut qu’elles soient accrocheuses, l’enjeu est terrible. Si on se rate, le lecteur n’ira pas plus loin. Je modifie mon début de roman même une fois l’écriture de celui-ci terminée, je ne sais combien de fois.

Je choisis un autre paragraphe du livre pour le mettre au début, juge de l’effet, en choisis un autre avant d’être satisfaite. Le titre aussi me cause des tiraillements de cheveux. Avant de trouver le bon, celui qui va vraiment coller au bouquin, quelle prise de tête !


4. Comment développez-vous vos personnages ? Y a-t-il des éléments de votre propre vie que vous incorporez dans vos personnages ?

Mes personnages, leur psychologie, leur physique, leur parcours de vie s’imposent d’eux-mêmes suivant l’histoire. Ils sont nourris de notre propre psychologie bien sûr, mais surtout de tous les êtres qui ont traversé notre vie...

Un romancier est observateur, même inconsciemment. Il engrange tout ce qu’il voit, tout ce qu’il entend, constitue un terreau qui lui servira lors du façonnage de ses personnages. C’est curieux la façon qu’ils peuvent prendre vie. C’est le miracle de l’écriture.


5. Avez-vous une routine de recherche particulière pour vos livres, surtout s’ils sont historiques ou nécessitent des connaissances spécifiques ?

Il est loin le temps où j’allais à la bibliothèque consulter des ouvrages pour écrire mes histoires. Maintenant, avec Internet, c’est un jeu d’enfant de faire des recherches et d’élaborer sa documentation. Sur n’importe quel sujet.

Ce qui me plaît le mieux est Google Maps. On peut se déplacer virtuellement comme si on y était. C’est facile de calculer les distances à pied, voir ce qu’on va y rencontrer sur son passage. Tiens, ici, il y a un réparateur de vélo, si je l’incluais dans mon livre, puisque le pneu de mon héroïne va éclater ici...


6. Comment gérez-vous les critiques de vos œuvres, qu’elles soient positives ou négatives ?

Je le gère bien. L’essentiel est qu’on parle du livre. Qu’il soit dans l’oubli ou l’indifférence est le pire. De toute façon, il faut se dire qu’on ne peut pas plaire à tout le monde, même les plus grands écrivains ont leurs détracteurs.


7. Quel(s) auteur(s) ou quelle(s) autrice(s) vous ont le plus influencé dans votre carrière et pourquoi ?

Je suis une très grande lectrice. En premier lieu, mon écriture est fortement influencée par les romancières américaines que sont Joyce Carol Oates et Laura Kasischke. Leur œuvre est une plongée dans un quotidien à l’apparence ordinaire où l’étrange surgit soudain. Une écriture au scalpel où s’installe un vertigineux sentiment de trouble et d’inquiétude.

En France, j’aime les auteurs comme Nour Malowé, Alice Ferney, Anne Berest, Delphine de Vigan, François Bégaudeau, Sandrine Collette ou Grégoire Delacourt, pour ne parler que de ceux qui ont bâti une œuvre. Tous m’influencent d’une certaine façon, mais celui qui m’a vraiment marquée et qui a révolutionné ma manière d’écrire est le tout dernier « La maison vide » qui a remporté le prix Goncourt. Je ne peux plus écrire les dialogues avec des tirets !


8. Si vous pouviez dîner avec n'importe quel(le) auteur(autrice), vivant(e) ou décédé(e), qui choisiriez-vous et pourquoi ?

J’adorerais dîner avec Joyce Carol Oates, mais je ne parle pas assez bien l’anglais pour soutenir une conversation littéraire et puis sa maigreur me fait dire qu’elle ne doit pas avoir un bon coup de fourchette.

Je choisirais donc le rondouillard Émile Zola. On parlerait, en bon français, de ses Rougon-Macquart et il y aurait de quoi alimenter le dîner. Sans compter que, vu la description des plats dans ses livres, il a dû être un sacré bon vivant. Parler littérature dans la ferveur des agapes, quels heureux moments en perspective !


9. Quel conseil donneriez-vous aux écrivains et écrivaines en herbe qui cherchent à publier leur premier livre ?

La patience, la pugnacité pour ne jamais renoncer. Attention à l’autoédition. Tous mes romans publiés (même très peu de temps) en autoédition sont refusés systématiquement en comité de lecture des maisons d’édition traditionnelles. Les éditeurs aiment de « la chair fraîche » et pas du réchauffé. À part si le livre autoédité a vraiment cartonné.

Donc, avant d’autoéditer, réfléchissez bien. Il restera toujours une trace de vos romans autoédités, même si vous changiez titre et couverture. Ou écrivez-en de nouveaux avant de les soumettre aux éditeurs.


10. Comment voyez-vous l'évolution du monde de l'édition et de la littérature avec l'essor du numérique et des réseaux sociaux ?

Je suis assez pessimiste sur l’évolution du monde de l’édition. Pas par peur du numérique, même si je lis moi-même sur liseuse, je me rends compte que le livre papier ne peut être remplacé.

Ce qui m’effraie est plutôt l’autoédition qui se développe (aujourd’hui n’importe qui peut écrire un livre) et, nouvellement, l’IA. Quand on pense que certains autoédités ont écrit leur livre entièrement grâce à l’intelligence artificielle et, pire, qu’il y a des lecteurs pour les lire et les apprécier, ça fait froid dans le dos.

Dans le vivier des autoédités, il y a des auteurs qui écrivent remarquablement bien et d’autres qui pondent des livres mal écrits plus vite que leur ombre. Difficile, pour le lecteur, ensuite, de s’y retrouver.

Quant à l’édition traditionnelle, elle est en perte de vitesse, pour maintes raisons qu’il serait beaucoup trop long de développer ici.


11. Avez-vous des projets futurs dont vous aimeriez parler ?

Mon livre « L’ange roux et le corbeau » est sorti le mois dernier. Je me concentre donc sur sa promotion actuellement.

Mes projets ? J’écris un roman inspiré d’un ancien fait divers. Je prends mon temps, lorsqu’il sera au point, je recommencerai ma tournée des éditeurs. Sinon, j’ai 3 autres romans aboutis, toujours en recherche de « papa » qui voudra bien les reconnaître (mes éditeurs actuels ne font pas dans le roman).


12. Quel est le livre que vous avez lu récemment et qui vous a le plus marqué ? Pourquoi ?

Eh bien je reviens à « La maison vide » de Laurent Mauvignier. Plus que l’histoire, c’est l’écriture qui m’a le plus subjuguée. Haletante, forte, précise... une écriture en mouvement, je ne peux pas la décrire différemment, une danse qui m’a emportée.

J’ai pris une leçon d’écriture magistrale. Il a fait de cette maison vide un monument.


13. Pouvez-vous partager une anecdote amusante ou mémorable de votre parcours d'écrivain(e) ?

Une petite anecdote, c’était en 2007, lorsque mon premier recueil de nouvelles humoristiques sur l’hôpital a été publié. À peine paru, j’ai fait un salon du livre dans ma ville en Haute-Savoie. C’était mon premier, j’en ignorais tous les codes. C’était un salon important avec d’illustres auteurs.

La veille, était sorti au Dauphiné Libéré un article sur moi. En fait, c’était un copain journaliste qui était venu me photographier avec mes bouviers bernois pour me faire la pub du livre et mentionner ma participation au salon. Je pense que c’est plus la photo de mes chiens (que j’avais fait grimper pour la photo sur mon canapé) que le livre en lui-même qui a plu.

Toujours est-il que, le lendemain, au Salon du livre, à peine installée à ma table d’autrice, j’ai vu se former une file qui n’a pas désempli de la journée... Une longue queue qui attendait de faire dédicacer mon recueil. Je me suis prise pour Amélie Nothomb, il ne me manquait plus que le chapeau. Le soir, j’en avais dédicacé 70 exemplaires et tournais le poignet avec nonchalance comme d’une chose normale.

J’ai cru que ça se passerait toujours comme ça en salon ! Plus naïve, tu meurs ! Pas plus que je ne me suis étonnée d’avoir été encadrée par de grands auteurs... C’était normal de côtoyer un Marc Lévy ou un Bernard Werber. « Bonsoir Marc, t’as eu du monde, toi ? Moi, super ! »

Et bien entendu, ça ne s’est jamais renouvelé ! Les 70 exemplaires vendus en une journée, je ne les vois plus qu’en rêve, je n’ai jamais eu la possibilité de refaire un grand salon. Et dans ces petits salons que je fais, il y a quelquefois plus d’exposants que de visiteurs... La roue tourne quelquefois à l’envers. Mais l’espoir reste. Je n’ai pas dit mon dernier mot !


14. Si vous pouviez être un personnage de fiction pour une journée, qui choisiriez-vous et pourquoi ?

Si j’avais la possibilité d’être un personnage de fiction pour une seule journée, j’aimerais être Mary Poppins, descendue des nuages avec son parapluie et dotée de pouvoirs magiques pour améliorer l’ordinaire des enfants Banks, quoi de mieux ?


15. Quelle est votre citation préférée sur l'écriture ou la lecture, et pourquoi résonne-t-elle avec vous ?

J’ai toujours trouvé cette citation d’Henry de Montherlant très juste : « Ce sont les mots qu’ils n’ont pas dits qui font si lourds les morts dans leurs cercueils ». Tout est dit. Le pouvoir des mots... Il vaut mieux les prononcer de son vivant. Après, c’est trop tard... Et les écrire est encore mieux."



Merci pour cette interview qui nous a permis de vous découvrir de manière originale. Beaucoup de succès dans la diffusion de votre livre.

Bonne journée et surtout bonne lecture,

Naomi

Contact :

Collectif éditorial « Le Colibri Rouge »


La collection « Contre Chant » réunit des écrivains et des artistes autour des mots et de la musique. Des auteurs et autrices y donnent chair aux chansons d’interprètes qu’ils aiment, en les transformant en nouvelles littéraires. Les fans s’y retrouvent, les amoureux des mots aussi : les chansons prennent une autre dimension, plus intime, plus romanesque, sans jamais trahir leur essence.

Dans ce cadre, Muriel Martinella relève le défi de faire vivre les chansons de Mylène Farmer à travers des nouvelles puissantes, sensibles et denses. Elle parvient à honorer une œuvre elle-même nourrie d’Apollinaire, Baudelaire, Verlaine, du marquis de Sade ou encore d’Edgar Allan Poe, en tissant des textes qui questionnent, intriguent et dérangent à leur tour. De livre en livre, Muriel Martinella s’impose comme une autrice d’une grande qualité littéraire.

Son livre est disponible sur le site de Grrr…Art Éditions, chez Eyrolles et en librairie (commande possible via les sites de librairies partenaires).


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