Propre d’Alia Trabucco Zeran
- murielmartinellaauteur
- il y a 4 jours
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La fillette meurt. Voici le fait par lequel Estela commence son récit, seule dans une pièce sans fenêtre, face au miroir sans tain qui abrite des interlocuteurs invisibles.
Estela, qui a quitté sa famille dans le sud du Chili pour la capitale où elle a travaillé jusqu'ici, Estela qui s'est occupée pendant sept ans de la jeune victime de sa naissance jusqu'à sa mort.
Que s'est-il passé ?
Ah, voilà un roman psychologique comme je les aime ! Prix Fémina étranger en 2024 aux éditions Robert Lafont. Le quatrième de couverture promet un roman haletant, c’est réussi, on ne peut le lâcher !
Dans un monologue amer et révolté, isolée dans cette salle d’interrogatoire, Estela parle, parle comme si personne ne pouvait l'arrêter. Elle n’a d’autre arme que la parole pour rapporter aux oreilles condamnées à l’écouter son existence faite de répétitions et de solitude. Elle nous somme de regarder et d'écouter son récit débité avec amertume et sarcasme. Elle pointe du doigt l'indécence qu'est l'intimité entre patrons et employée alors qu'elle est au service de monsieur et madame, couple exigeant et condescendant de la classe moyenne aisée dont elle lave à la main les petites culottes. Des employeurs qui sont de nature ni perverse ni sadique, mais dont la domination est simplement construite sur leur réussite sociale.
Vivre au service des autres, c’est échanger sa vie contre la leur.
Page après page, un suspens virtuose prend le lecteur. On veut savoir ce qui est arrivé à cette fillette, nous voilà pris sous le joug de ce rapport implacable du mépris de classe.
D’autant plus que face à cette personnalité difficile à cerner, on éprouve par moments de sérieux doutes sur la santé mentale de la nourrice et l’on pense tout de suite au roman de Leïla Slimani, « chanson douce ». En fait, ce que raconte Propre, c'est tout autre chose.
L'écriture est remarquable, souple, incisive et remuante. Une auteure chilienne qui manque ni de talent ni de mordant.
Un roman choc sur les ravages des rapports de classe. Ça se dévore comme une enquête, ça se réfléchit comme un essai.
BIOGRAPHIE
Alia Trabucco Zerán est née au Chili en 1983. Son premier roman, La Soustraction (Actes Sud, 2021), a été nommé par El Paísdans la liste des dix meilleurs premiers romans de 2015 et sélectionné pour l'international Booker Prize 2019. Son ouvrage de non-fiction, Las Homicidas, a remporté le British Academy Book Prize 2022. Propre a été publié en espagnol fin 2022 et est en cours de traduction dans 16 langues.
RESUMÉ :
Le monologue d`une domestique qui retrace, dans un récit lucide, impitoyable et brutal, les étapes menant au drame qui fera s`effondrer le décor d'une vie "propre".« Je m'appelle Estela, vous m'entendez ? Es-te-la Gar-cí-a. »La fillette meurt. Voici le fait par lequel Estela commence son récit. Estela, qui a quitté sa famille dans le sud du Chili pour la capitale où elle travaille comme employée de maison. Estela, qui s`est occupée pendant sept ans de la jeune victime, l'a bercée, nourrie, rassurée, grondée aussi. Qui connaît chaque étape ayant mené au drame : la chienne, les rats, les aveux, le poison, le pistolet. Chaque étape jusqu'à l`inéluctable.Un roman psychologique haletant, angoissant et addictif, à travers lequel notre époque se dessine – une société fracturée par les rapports de domination et d'argent, où les uns vivent dans l`ombre des autres." L'une des voix les plus puissantes de la littérature chilienne actuelle. Délicieusement angoissant et addictif. " El País" Époustouflant, tragique et essentiel. " El Mundo" Un roman sans échappatoire. Acide, intelligent, bien construit et authentique. " El Diario" Alia Trabucco Zerán a écrit un cauchemar envoûtant. Un portrait mordant et addictif de la pourriture que cachent les "bonnes familles". " Fernanda Melchor

Jolie chronique qui semble efficace, je vais le lire...